LE CHIEN EN DEUIL
Nous nous promenions dans un petit village danois, quand mon attention a été attirée par un vieux labrador noir au museau grisonnant, qui s’approchait à pas lents de l’église. Comme beaucoup d’églises danoises, celle-ci était entourée d’un joli petit cimetière. A part la petite plaque en marbre où était gravés le nom du défunt ainsi que la date de sa naissance et de sa mort, chaque tombe ressemblait presque à un petit jardin entouré de buis, dans lequel étaient plantés des arbustes, cyprès, rhododendrons, lilas, rosiers, etc. Le sol était recouvert de graviers et pas une mauvaise herbe ne dépassait. Contrairement aux cimetières français si tristes et angoissants avec leurs grosses pierres tombales, leurs monuments funéraires et leurs fleurs souvent artificielles ou fanées, celui-ci donnait à la mort un aspect naturel et presque acceptable
En passant près de moi, le chien a levé les yeux et je lui ai trouvé l’air très triste. J’avais entendu dire qu’il arrive que des chiens viennent chaque jour sur la tombe de leur maître ou de leur maîtresse. Je me suis donc arrêtée pour voir ce qu’il allait faire. Il est entré effectivement dans le cimetière et est allé jusqu’à une tombe, qui se trouvait sur la gauche, au coin de l’église, derrière les deux cyprès. On voyait bien qu’il n’avait pas erré au hasard dans les allées, et qu’il savait très bien où il allait. Il s’est arrêté et est resté là quelques instants, immobile. Il ressemblait vraiment à quelqu’un qui vient se recueillir sur la tombe d’un proche. Il a ensuite refait lentement le même chemin en sens inverse. J’attendais devant l’entrée. Il a levé à nouveau vers moi un regard plein de détresse, avant de s’éloigner du même pas lent qui lui donnait l’air si accablé.
Les animaux ne peuvent pas exprimer leur chagrin par des larmes, mais je crois qu’à l’intérieur, ce pauvre chien pleurait.