Le jeu de l'amour et du hasard (4)

Publié le par Françoise Andersen

Suite et fin            LE  VOYAGE  À  COPENHAGUE

 

Une fois de retour à la maison, étant donné qu'Inger n'avait pas appelé pour s'excuser d'avoir oublié notre rendez-vous, j'ai hésité à l'appeler. Je trouvais sa conduite inexcusable. Je l'avais attendue en vain plus d'1/2 heure. J'avais envie de tout laisser tomber et de me débrouiller toute seule pour l'oral de danois, car ça devenait vraiment trop compliqué.

 

Mais comme j'étais arrivée un peu en retard à la fontaine St-Michel, je me suis dit qu'il était possible qu'elle ait eu moins de patience que moi et qu'elle soit repartie au bout de 5 minutes en voyant que je n'étais pas là.  Ou bien elle avait pu avoir un accident. Elle était peut-être dans un lit d'hôpital dans le coma ou pire à la morgue. J'ai toujours eu l'art de dramatiser les choses, car je suis une perpétuelle angoissée.  J'ai donc trouvé plus poli de l'appeler. En fait elle avait complètement oublié notre rendez-vous. Elle était sincèrement désolée. Elle m'a donné l'adresse de la famille dans laquelle elle était jeune fille au pair en banlieue, en m'invitant à venir lui rendre visite un mercredi, qui était son jour de congé. 

 

Cette fois-ci nous nous sommes enfin rencontrées et nous avons tout de suite sympathisé. Je me souviens qu'on était à la fin février, mais qu'il faisait si beau que nous avons pu prendre le thé dehors sur la terrasse. Elle n'en revenait pas. Elle m'a dit qu'au Danemark, ce jour-là  il y avait moins 15 et qu'il neigeait. Elle m'a appris qu'il commençait en général à neiger fin octobre et que ça ne fondait que fin avril-début mai. Je me suis dit que je n'aimerais pas habiter dans un tel pays !

 

Comme elle parlait bien mieux le français que moi je ne parlais le danois, nous nous sommes mises automatiquement à parler français. En fait je ne me souviens pas avoir jamais travaillé mon danois avec elle. En effet nous ne nous sommes vues que deux fois. Après ma visite, elle est venue un dimanche déjeuner chez mes parents, à Creil. Bien sûr,  la conversation a eu lieu en français. Elle devait rentrer au Danemark peu après et je n'ai jamais donc pratiqué mon danois. Je me demande encore aujourd'hui comment j'ai pu avoir mon certificat de Langues et Littératures scandinaves. Je pense que grâce à un système de coéfficients et de bonnes notes à l'écrit, ça a compensé. 

 

Avant de quitter la France, Inger m'a dit que bien que les hivers soient très rigoureux au Danemark (ils l'étaient à l'époque) les étés étaient très agréables. Elle m'a invitée à venir passer une dizaine de jours chez ses parents qui "seraient ravis de me recevoir". En fait ils n'étaient pas au courant de l'invitation que je n'ai d'ailleurs pas prise au sérieux. Mais ce n'était pas une invitation de Gascon: dans une lettre reçue quelques semaines plus tard, Inger m'a à nouveau invitée et la date à été fixée au début juillet pour une période de 10 jours. Elle m'a dit qu'elle avait un frère, mais qu'il ne serait pas là, étant donné qu'il serait en vacances en Italie avec des copains.

 

Mais quand je suis arrivée dans la petite "maison d'été" de banlieue où habitaient ses parents pendant la belle saison - comme beaucoup d'habitants de Copenhague - la premère personne que j'ai vue devant la porte, ça a été Knud, le frère en question. 

 

Il s'est avéré que, juste avant mon arrivée, Inger était tombée amoureuse et qu'elle devait partir le lendemain en vacances avec son chéri, sans se soucier de moi. Elle comptait sur son frère pour me faire visiter Copenhague. Mes sorties avec lui sont vite devenues très romantiques et la veille de mon départ (c'était un 17 juillet)  il m'a demandé si je voulais l'épouser. J'ai accepté le plus naturellement du monde. Nous avons même fixé la date du mariage au 17 juillet de l'année suivante, le jour anniversaire de cette demande en mariage.

 

Avant mon départ Knud m'a acheté une chaîne en argent avec un petit coeur. Dès mon arrivée à l'aéroport c'est la première chose qu'a remarquée ma mère. Elle était effondrée. Elle m'a dit "Et si on s'oppose à ce mariage, ton père et moi". J'ai eu alors une réaction cruelle que je regrette aujourd'hui. Je lui ai répondu: "Ca ne changera rien. Je suis majeure" . Je venais en effet d'avoir 21 ans, âge de la majorité en 1960. Ma seule excuse, c'est que j'avais eu une éducation trop stricte et que comme pour beaucoup de filles de cette époque, le mariage était un moyen d'échapper au joug paternel.

 

Ma mère a ensuite reproché à mon père de m'avoir empêchée de faire des études d'espagnol. En effet j'aurais voulu être prof d'espagnol, mais à l'époque il fallait passer 6 mois dans en Espagne et mon père avait eu peur que je "m'entiche" d'un Espagnol et que je parte vivre en Espagne. Ma mère m'a dit ensuite, lors d'un séjour à Copenhague: "Si tu t'étais mariée avec un Espagnol, c'aurait été quand même mieux pour nous, pour venir vacances chez toi".

 

Comme quoi je ne m'appellerais pas maintenant Françoise Andersen:


- Si je n'étais pas passée devant l'affiche de l'Institut d'Études scandinaves juste au moment où elle était en train d'être collée. Une fois en place, je ne l'aurais peut-être pas remarquée parmi toutes les autres.

 

- Si les cours de norvégien n'avaient pas eu lieu à la même heure que mes cours d'anglais

 

- Si je n'avais pas eu peur d'aller travailler avec un Danois dans sa chambre.

 

- Si je n'avais pas rappelé Inger après le lapin qu'elle m'avait posé boulevard St-Michel

 

- Si le voyage de son frère en Italie n'avait pas été annulé au dernier moment

 

- Et enfin si Inger ne m'avait pas jetée dans les bras de son frère en m'abandonnant pour aller en vacances avec son amoureux (qui est d'ailleurs devenu mon beau-frère un an après mon propre mariage).

 

 

 

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@
<br /> Moi, je lis tes réponses ! <br />
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F
<br /> <br /> Merci. :))<br /> <br /> <br /> Je n'étais pas sûre que les gens aient le temps de revenir sur mon blog pour voir mes réponses. Mon blog est nouveau et peu fréquenté, alors j'ai le temps d'écrire à tout le monde. mais je<br /> comprends très bien les gens qui ont déjà tissé des liens avec un tas de blogueurs /euses ces dernières années et qui n'ont pas le temps de venir chez moi. Il faut que les blogs soient une source<br /> de plaisir et pas de contrainte. Mais ton message m'a fait très plaisir. <br /> <br /> <br /> Bonne journée. Ici c'est encore gris. Un temps de novembre...  ;))<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> Bonsoir Françoise<br /> <br /> <br /> Je viens de lire tes quatre billets sur le jeu de l'amour et du hazard. Ton histoire d'qmour qui dure encore, bravo ! était écrite certainement, la destinée nous emmène quelquefois là où l'on ne<br /> s'attendait pas ! C'était un plaisir de lire tes lignes et je suis sûre que beaucoup de souvenirs te sont revenus en écrivant.<br /> <br /> <br /> @nnie<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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F
<br /> <br /> Tu as raison, j'ai revécu tout çaa avec plaisir.<br /> <br /> <br /> En fait tout le monde devrait écrire ses mémoires pour les générations futures. Je regrette de ne pas en savoir plus par exemple sur mes grands-parents paternels. Je sais seulement que le mariage<br /> de mes grands parents maternels avait été arrangé, en Corse. Des tantes les avaient présentés l'un à l'autre. Ils étaient restés 1 heure ensemble. Ensuite on leur avait demandé: "Alors ? " Mon<br /> grand-père avait dit : je veux bien, elle est très jolie" et ma grand-mère avait aussi dit qu'elle était d'accord, car il "avait un regard doux". Ils s'étaient mariés sans s'être revus. Je ferais<br /> mieux d'écrire sur mon blog au lieu d'écrire des réponses que peut-être personne ne lit ! <br /> <br /> <br /> <br />
V
<br /> C'est une belle histoire. Ca doit être agréable pour toi de repenser à ce temps-là et de coucher tes souvenirs par écrit, histoire de les immortaliser un peu.<br />
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F
<br /> <br /> C'est vrai. Des  détails que j'e croyais avoir oubliés sont remontés à la surface. C'est bien quand on est vieux, de pouvoir revivre sa jeunesse. Ca doit être terrible quand la mémoire<br /> disparaît. C'est comme si on avait vécu pour rien.<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> et bien comme quoi !! Quelle belle histoire ! et qui dure depuis longtemps !<br /> <br /> <br /> bonne fin de journée<br />
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F
<br /> <br /> Ca a fait 52 ans le 17 juillet 2012<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> J'ai bien aimé la réflexion de ta mère "cela aurait été mieux d'aller te voir en Espagne"   <br /> <br /> <br /> Et non, moi je ne trouve pas que tu as répondu durement à ta mère, je trouve ça logique en fait.  Je répondais comme toi, sinon pire ! Pourtant j'adorais ma mère, mais j'étais une peste !!!!<br /> <br /> <br /> Et comme quoi, ton destin était écrit !<br /> <br /> <br />  <br />
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F
<br /> <br /> Tu me rassures. Merci. J'avais mauvaise conscience d'avoir eu cette réaction.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> Si, si, si, si et si ça avait été écrit que cela devait être ains!!!!!!! <br />
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F
<br /> <br /> Si tout est écrit, alors on n'est responsable de rien ? <br /> <br /> <br /> <br />
K
<br /> Comme quoi en effet l'amour n'est jamais là où on l'attend<br />
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F
<br /> <br /> Maintenant beaucoup le cherchent sur Internet. J'ai été étonnée de voir une émission sur des couples qui fonctionnaient très bien et qui s'étaient connus sur le Net. ils expliquaient qu'avant<br /> d'avoir eu envie de se rencontrer "pour de vrai" ils avaien tlongtemps correspondu, avaient appris à se connaître. Dans le fond c'est peut-être plus sage que de s'en remettre au hasard ?<br /> <br /> <br /> <br />